L’origine de l’Année sainte dans la bible
Le Lévitique, un des cinq livres du Pentateuque dans l’Ancien Testament, présente les préceptes moraux et les vérités religieuses transmises à Moïse pour guider son peuple vers la sainteté. Au chapitre 25 est exposée la notion d’année sainte :
« Tu compteras 7 semaines d’années, c’est-à-dire le temps de 7 semaines d’années, 49 ans ; le 7e mois, le 10e jour, tu feras retentir l’appel de la trompe. Le jour des expiations, vous sonnerez de la trompe dans tout le pays. Vous déclarerez sainte cette 50e année et proclamerez l’affranchissement de tous les habitants du pays. Ce sera pour vous un jubilé ; chacun de vous rentrera dans son patrimoine, chacun de vous rentrera dans son clan. Cette 50e année sera pour vous une année jubilaire. »
"Cette cinquantième année sera pour vous une année jubilaire : vous ne sèmerez pas, vous ne moissonnerez pas les épis qui n’auront pas été mis en gerbe, vous ne vendangerez pas les ceps qui auront poussé librement". (25:8–55).
A partir de l’hébreu yôbel qui désigne le cor en corne de bélier, utilisé pour annoncer le début de l’année sainte, saint Jérôme a créé le mot jubilæus, « jubilé », avec la nuance supplémentaire de réjouissance (du latin jubilare, « se réjouir »).
en L’AN 1300 Le premier jubilé catholique
L’Eglise catholique reprend officiellement la notion d’année sainte ou jubilé sous le pape Boniface VIII qui l’institue le 22 février 1300, jour de la fête de la chaire de saint Pierre. L’indulgence plénière est accordée cette année-là à certaines conditions : être en état de grâce (après confession et absolution), avoir visité les basiliques de Rome, Saint-Pierre et Saint-Paul-hors-les-murs, promues alors basiliques majeures. Prévu à l’origine tous les cent ans, le deuxième jubilé a finalement lieu en 1350, puis à partir de 1450 tous les 25 ans. Le dernier jubilé a eu lieu en 2000 sous Jean-Paul II.
Le jubilé à Compostelle : sur les traces de Rome
A Compostelle, l’institution de l’année sainte est vraisemblablement postérieure de quelques années à celle de Rome, contrairement à ce que prétend un faux qui la fait remonter au XIIe siècle, à l’époque de Gelmirez, évêque de Compostelle, grand promoteur du pèlerinage. Le jubilé tombe l’année où le 25 juillet, fête de saint Jacques, est un dimanche, la découverte du tombeau de l’apôtre ayant été faite un dimanche, selon la tradition. L’année sainte a donc lieu selon les intervalles successifs de 11, 6, 5, et 6 ans. Comme à Rome, une porte qui reste ordinairement murée est ouverte cette année-là dans la cathédrale.
C’est en 1982 que le jubilé connaît un véritable essor grâce au pape Jean-Paul II qui fait lui-même le pèlerinage à Saint-Jacques. Depuis, le nombre de pèlerins ne cesse de croître : près de
100 000 pèlerins à Compostelle en 1993, presque 160 000 en 1999, 180 000 en 2004…
En galicien, Ano Santo Xacobeo a donné Año Santo Jacobeo en Espagnol, puis Año Jacobeo, traduit en français par Année Jacquaire.
Le jubilé dans les autres lieux de pèlerinage
D’autres hauts lieux du christianisme ont à leur tour institué une année sainte spécifique.
Ainsi, la cathédrale du Puy-en-Velay est dédiée au mystère de l’Annonciation. L’année où la fête de l’Annonciation, le 25 mars, coïncide avec le Vendredi Saint, est une année sainte.
De même, le sanctuaire de Santo Toribio à Liebana qui conserve le lignum crucis, le fragment le plus important de la Sainte Croix, rapporté de Palestine par l’évêque Thoribe d’Astorga, célèbre son jubilé quand la fête de Santo Toribio, le 16 avril, est un dimanche.
L’année sainte
ou le nécessaire retour à l’essentiel
Un épisode de la Genèse (IV, 1-16) apporte un éclairage particulièrement significatif sur la doctrine biblique et l’antinomie entre sédentarité et nomadisme. Caïn présente à Dieu les meilleurs fruits de ses champs et jardins et Dieu ne les regarde pas. En revanche son frère Abel Lui présente les derniers-nés de son troupeau et Dieu les accepte.
Jean-Paul II, dans son message pour la 85e journée mondiale des migrants, le 2 février 1999 cite cette phrase de la Bible : « La terre m’appartient et vous n’êtes pour moi que des étrangers et des hôtes » (Lv 25, 23) et la commente ainsi : « Dans cette parole du Seigneur, rapportée dans le Livre du Lévitique, est contenue la motivation fondamentale du Jubilé biblique auquel correspond, chez les descendants d’Abraham, la conscience d’être des hôtes et des pèlerins sur la terre promise. Le Nouveau Testament étend cette conviction à tout disciple du Christ qui, étant citoyen de la patrie céleste et concitoyen des saints (cf. Ep 2, 19), n’a point de demeure fixe sur terre et vit comme un nomade (cf 1 P 2, 11), toujours à la recherche du but définitif. […] Le Jubilé, en proposant une vision des biens de la terre qui en condamne la possession exclusive (cf. Lv 25, 23), conduit le croyant à s’ouvrir au pauvre et à l’étranger. »
Le pèlerin, même si ses convictions religieuses se sont émoussées, fait aussi une démarche vers l’essentiel et l’année sainte est pour tous, « voyageurs et étrangers sur la terre » (saint Pierre) une occasion de revivre cette condition fondamentale de l’homme et peut-être de trouver Dieu.
Publié le
27 mai 2010
- Mis à jour le
13 novembre 2023